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Tambay "27"

Pour Motorspots: DTM / Q & A avec Adrien TAMBAY, par Nicolas GEHIN

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http://motorposts.com/q-a-with-adrien-tambay-on-the-dtm-by-nicolas-gehin/

Par Nicolas Gehin


NG: Pour ceux qui ne connaîtrait pas encore, ou pas très bien, le DTM. Comment décririez-vous cette voiture et son comportement ?

AT: Elle a le look d’une voiture de série, d’une GT, mais c’est en fait plus une monoplace. Notamment sur la technique du freinage, très proche. Cela me rappelait bien plus la F3 que d’une Audi R8GT3 par exemple.

 NG: Comment une voiture peut-elle avoir une tête de berline et un comportement de monoplace ?

AT: C’est à mi-chemin entre une monoplace et un proto. La raison est simple. Tout est en carbone, il y a beaucoup d’aéro, d’effet de sol, un diffuseur à l’arrière. Bref, rien à voir avec une voiture de tous les jours ou une GT façon WTCC. La seule vraie différence avec une F3 est le poids. Comme c’est plus lourd, il faut garder les freins un peu plus longtemps, afin de stopper l’inertie.

NG: On a l’impression que désormais les voitures de course se ressemblent de plus en plus ?

AT: Ce n’est pas faux ! Toutes les voitures deviennent de plus en plus pointues, de plus en plus sophistiquées,  elles ont de nombreux organes en commun (carbone). La variable d’ajustement maintenant est incontestablement le poids et la puissance. Et un DTM a du poids, certes, mais aussi de la puissance !

NG: Quelle est la vraie spécificité de pilotage d’une DTM ?

AT: Il y a dans ces voitures une vraie contradiction qui en fait sa spécificité. Il y a un mélange de roulis (la voiture bouge) mais de rigidité aussi. On la règle très rigide sur le bas, en suspensions, pour la partie mécanique et aéro, mais quand même elle roule dans le virage car elle est lourde. Faut aller chercher le grip dans les virages. C’est d’ailleurs ce que j’aime.

NG: Pourquoi ce choix du DTM ?

AT: La course automobile est ma passion. J’adore piloter. Donc j’ai regardé les championnats où je pourrais gagner ma vie. Car dans d’autres, il faut apporter un budget. Le DTM m’a bien plus tout de suite. C’est un championnat historique mais qui grandit encore. Pour moi, en haut de l’affiche du sport automobile, il y a la F1 et le DTM. Il y a bien eu des vues du côté du Japon, mais les vrais rendez-vous concrets ont eu lieu avec le DTM.

NG: Qu’est-ce qui a pu vous faire hésiter ?

AT: Le fait d’être un peu isolé. Il n’y a pas d’autres Français en DTM. Même s’il y en a eu dans le passé, comme Alesi, Aïello…

NG: Qu’est-ce qui vous a motivé encore plus ?

AT: La compétition acharnée et le fait que quand on est bon en DTM, on est bon en protos et inversement. On est même bon en F1 ! Regardez Di Resta.

NG: Comment avez gagné votre place chez Audi ?

AT: Le terme est bien choisi. J’ai gagné ma place. Le Docteur Ullrich m’a convoqué à Monte Bianco, fin novembre 2011. Il a été honnête avec moi. Il voulait savoir ce que je valais mais il n’y avait aucun baquet disponible pour la saison 2012. Nous étions trois. J’ai été le plus rapide. Je n’ai plus eu de nouvelles pendant deux mois. Jusque fin janvier. Je me rongeais les ongles car je n’avais aucun volant. Mais j’espère que quelque chose bouge en ma faveur. Le patron d’Audi Sport m’a envoyé une invitation, par email, à un nouveau test. Avec une nouveauté cette fois. Ils avaient décidé d’engager une 8e voiture pour la saison à venir. Bref, j’avais ma chance ! Huit autres pilotes pensaient comme moi. On s’est affronté pendant deux jours. Simulation de qualifications, de course. Des huit candidats au départ, cinq ont été éliminés. Et finalement, j’ai gagné !

NG: Quel est la vraie spécificité de ce championnat ?

AT: Que presque toutes les voitures peuvent signer un podium. Que beaucoup de voiture peuvent gagner. Que de nombreux pilotes peuvent être champions. Pas commun.

NG: Qui êtes vous Adrien?

http://www.youtube.com/watch?v=QdZvgFdtCRI

NG: Quel souvenir gardez-vous de votre toute première course, à Hockenheim, en 2012 ?

AT: Je ne voulais toucher personne ! J’avais un peu peur, dans le peloton, d’être trop agressif ou pas assez agressif. Les années karting vous apprennent les batailles serrées mais en monoplace, on apprend justement à ne plus mettre des coups de pare-chocs ou de roues.

NG: Alors, comment faut-il piloter ? Mettre des coups de roue ou pas ?

AT: Le problème est que quand vous en mettez, en général, il est facile d’en faire trop ! Et si vous n’en mettez pas, vous êtes sûr de ne pas en faire assez et donc, tout le monde vous passe devant. C’est ce qui m’est arrivé lors de mes deux premières courses. Un coup j’attaquais trop, un coup je n’attaquais pas assez, et finalement un pilote m’a harponné deux fois. Tout est une question d’équilibre. Je l’avais trouvé en partie fin 2012. Début 2013, j’ai replongé, avant de retrouver la recette magique. En Russie, j’ai réussi les plus beaux dépassements de ma carrière en DTM.

NG: Physiquement, étiez-vous prêt ?

AT: Je me prépare depuis longtemps. Je m’entraîne beaucoup. Mais c’est vrai que j’en ai bavé au début. Les courses d’AutoGP duraient 45 min, en DTM la cours dure deux fois plus longtemps.

NG: Le physique est-il vraiment important ?

AT: Oui. Sinon vous faîtes des fautes. C’est justement ce qui m’est arrivé au début. Comme physiquement j’avais du mal, je faisais plein de petites fautes. J’ai un peu paniqué. Finalement, j’ai progressé au fil des courses, et maintenant, je suis même assez bon en constance de course.

NG: Comment une DTM se règle-t-elle ?

AT: On a encore plus de liberté qu’en F3, série connue pour être la meilleure école de mise au point. Cela a un peu changé cette année. Le DTM a décidé de geler certaines parties de la voiture, pour réduire les couts. Malgré cela, la voiture évolue à chaque course. On est sur un rythme de développement qui est le seul à pouvoir soutenir la comparaison avec la F1. Pour les réglages, on travaille sur la hauteur de caisse, le carrossage, les pressions de pneus, les géométries.

NG: Qu’est-ce qui est le plus difficile, côté mise au point ?

AT: Les week-ends sont courts, on roule de moins en moins. Il y a un réglage de base avant même qu’on ne roule et ensuite on affine. Mais on n’a qu’une séance d’essais libres !

NG: Quel est votre réglage idéal d’une voiture ?

AT: J’aime freiner tard. C’est la base pour moi. Tout part de çà. Il me faut de la confiance sur les freins. Donc du sous-virage m’aide un peu dans les virages lents pour faire tourner la voiture, en revanche, je n’aime pas le sous-virage dans les rapides. Sinon ça limite la vitesse d’entrée.

NG: Y a-t-il eu un moment où vous avez senti avoir franchi un cap ?

AT: Oui. Les trois dernières courses de 2012. J’ai fini une fois 5e et une fois 2e. Avant cela, mentalement, j’avais un léger manque de confiance. Maintenant, je sais que ma place est dans le top 7.

NG: Quelle a été votre meilleure course en DTM ?

Le Nürburgring cette année, Zandvoort aussi. Mais surtout la Russie. Je pars 14e, je fais le meilleur tour en course et je finis 4e.

Quels bons points vous accordez-vous ?

L’an passé, j’ai abandonné 4 fois. Contre une seule cette année. Et surtout, à la fin, j’ai aligné 4 courses dans les points. J’étais plus constant et présent dans le Top 7.

Où faut-il progresser ?

Les débuts de championnat. Comme je ne roule pas de l’hiver, je débute moyen mes championnats. Et cela a pas mal de conséquence par la suite. En revanche, je finis très bien.

Audi souffre depuis deux ans, même si elle a remporté le titre cette année avec Rockenfeller.

Début 2012, après la conception de la nouvelle voiture A5, on pensait être mieux que cela. Avec le temps,  on a compris que la voiture n’était pas mauvaise mais que parfois elle marche quand on ne s’y attend pas et puis elle ne marche pas quand on s’attend à une belle performance. J’ai connu pleins de séances où j’ai réalisé d’excellents chronos le samedi matin et pas le samedi après-midi ! La voiture est pourtant la même. Le DTM est tellement serré qu’un rien fait une grosse différence. Tout dépend des conditions de piste… Un peu comme la F1, avec ce qu’on appelle les fenêtres de fonctionnement.

Quels pilotes vous impressionnent le plus en DTM ?

Dans la famille Audi, le niveau est tellement élevé que c’est dur d’en sortir un seul ! Evidemment, il faut parler du champion 2013. Mike Rockenfeller. Il est rapide, constant. Et très fort en réglages. A la fin, j’ai pris ses réglages et tout marchait mieux. Il a compris beaucoup de choses avant nous. Et en plus, c’est un chouette type !

Quel est le retour d’Audi sur vos performances ?

Il est toujours difficile de savoir ce que les gens pensent de vous ! Mais j’ai l’impression qu’ils sont contents. Cela se passe bien. On se parle beaucoup. Je suis vraiment bien loti chez Audi. Ils sont professionnels et humains !

Le DTM a souvent été critiqué parce qu’il était trop politique. En bref, Mercedes décide qui gagne le championnat, Audi ou BMW pareil. Tout se jouerait avant course lors d’un briefing… En souffrez-vous ?

Le côté politique du DTM est toujours très exagéré par certains pilotes. Premièrement, le sport automobile est politique ! Il y a des gros enjeux et pas seulement au sein des grands constructeurs. Personnellement, je prends cette question très simplement. Je n’ai aucune réticence à aider un équipier mieux placé que moi au championnat. Ce serait stupide de jouer contre son camp. Maintenant, tout cela n’est possible que parce que l’on sait qu’un jour, nous aussi on sera, dans le même cas, aidé par ses petits camarades. Audi est là pour gagner, et elle sait renvoyer l’ascenseur. D’où l’important, comme je le disais plus haut, que je commence mieux mon championnat en 2014. Si, dans les trois premières courses, je marche fort, cela pourrait m’apporter beaucoup de soutien en fin de championnat. Tout est sain, clair et ouvert chez Audi.

Le DTM s’est converti à de nombreuses règles de la F1. Comme le DRS ou les deux types de pneus… Cela a-t-il beaucoup changé la donne pour vous ?

Oui, cela nous a plutôt aidé et m’a pas mal réussi. Surtout le fait d’avoir deux types de pneus, un dur et un tendre, que l’on doit chausser au moins une fois. Les courses sont devenues plus stratégiques. L’usure des pneus est un gros facteur de performance. Et je dois dire que cela me convient bien. J’arrive à faire des longs runs, à rester plus longtemps en piste et à moins dégrader les gommes.

Etes-vous, un moment, passé pas très loin de la victoire ?

Il y a eu, oui, un ou deux moments où quelque chose se mettait en place pour un très grand résultat. De l’extérieur, cela ne se voit peut-être pas. En Russie, et en Allemagne, avec la pluie. J’ai réussi, un temps, à doubler le leader virtuel. Malheureusement, la piste a séché. Une pensée a traversé mon esprit… Et si je gagnais ?

Quel est votre objectif pour la saison 2014 ?

Je m’étais fixé un programme de deux années pour apprendre. J’y suis arrivé au bout. Je me sens prêt pour viser plus haut. Gagner je ne sais pas, mais jouer les avant-postes toute la saison. Disons le Top 5. Mais il fait garder les pieds sur terre. Le DTM est un championnat hyper-compétitif ! Mortara, un excellent pilote, est 5e l’an passé avec 2 victoires, et en 2013, il a fini dernier. Sa qualité n’a pas changé. Donc je ferai de mon mieux.

Parlez-vous allemand ?

Non, mais je m’y mets. C’est important. Je progresse.

Pensez-vous encore à la F1 ? Vous avez roulé avec Grosjean, Bianchi…

Non, plus du tout. Je pense au DTM.

Et les 24 Heures du Mans ?

Audi est la référence au Mans. Faisant partie de la famille Audi, forcément c’est un objectif personnel. Je n’ai encore jamais roulé dans un proto du Mans. Mais j’aimerais.

Les Français d’Audi en endurance vous conseillent-ils ?

Loïc Duval est champion WEC cette année. Je suis content pour lui. Je le connaissais déjà via un ami en commun, Jean-Karl Vernay. Benoît Tréluyer, en revanche, je ne le connaissais pas. On se retrouve de temps en temps dans les stages de préparation physiques en Autriche… On parle. Ils sont des exemples pour moi.

Serez-vous un jour champion de DTM ?

Ce n’est pas impossible ! J’y crois et vais tout faire pour.

Quel serait le calendrier idéal pour cela ?

Gagner une ou deux courses en 2014, être performant et constant et progresser encore, gagner plusieurs fois en 2015, et viser le titre en 2016, j’y suis prêts!

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